L'Algérie au cœur du Soufisme- Le maître des maîtres : Abu Madian Shu'ayb

Il est des hommes dont le destin illustre à la fois leur propre grandeur et talent que l'époque où ils ont vécu. Incontestablement, Sidi abûMadian appartient à cette élite que le savoir, les arts ou les actes distinguent particulièrement, hissant ses membres au rang de symboles et de Marqueurs historiques. De son vrai nom, Shu'ayb ibn Hussein el-Andaloussi, cet enfant de Séville qui naquit au XIIe siècle (vers 1126), incarne bien cette Andalousie musulmane qui, en dépit des vicissitudesqu'elle connut et qui amenèrent sa chute, demeure une référence de société où la la spiritualité, les idées, les sciences et les arts de vivre trouvèrent a s’exprimer dans une harmonie assez rare.

Abû Madian étudia dans sa ville natale puis à Fès avant de se rendre à Tlemcen et à la Mecque. A son retour, il s’installe à Bejaïa dont il devint un éminent pédagogue et une figure spirituelle de premier plan. Il décéda vers 1197 prés du village d’al-Ubbâd attenant à Tlemcen.

Il peut sembler extraordinaire que cet homme qui, hormis son voyage de jeunesse dans cetteville, n'y avait jamais vécu, en devint finalement le saint-patron et ait été aussitôt reconnu etvénéré par ses habitants, au point qu'aujourd'huiencore, on ne puisse pas évoquer Tlemcen et ses trésors historiques, matériels et immatériels, sans le citer. Il n'y a pourtant rien d'étonnant à cela car, outre l'envergure intrinsèque du personnage, ce fait atteste de Ia liaison spirituelle très forte des anciennes cités d'Algérie et du Maghreb. Ce qu'il y a d'extraordinaire, en revanche, est sans doute l'admirable et insoupçonnée circulation des idées, des textes et des réputations qui irriguait le Maghreb tout entier avec des prolongements ramifiés sur l'Andalousie et le Machreq. Les mystiques, les penseurs, les scientifiques et les littérairesarpentaient sans cesse les espacesimmenses de l'aire de l'Islam. Leurs œuvres lesprécédaient souvent dans leurs escales et séjours.